Le Sahel est devenu ces dernières années, un foyer d’instabilité en raison de la multiplication des menaces asymétriques, notamment l’intensification des activités des groupes terroristes. Ceux-ci ont trouvé dans la région un refuge sûr, un environnement favorable à leur expansion et un espace propice au recrutement ainsi qu’à la reconstitution de leurs forces après leurs défaites ailleurs.
La région du Sahel est en effet, confrontée à des défis sécuritaires complexes au premier rang desquels figurent la montée du terrorisme et l’expansion rapide de la criminalité organisée transfrontalière.
La convergence d’intérêts entre ces deux phénomènes a donné naissance à une menace combinée qui dépasse les frontières nationales, affectant la sécurité régionale et internationale et amplifiant les facteurs qui entravent le développement et menacent la stabilité des
Selon le «Global Terrorism Index 2025», la région figure parmi les foyers les plus dangereux du terrorisme mondial : plus de la moitié des victimes du terrorisme en 2024 ont été recensées dans les pays du Sahel où 19% des attaques mondiales ont été enregistrées.
« Des statistiques complémentaires confirment cette tendance, faisant état de plus de 3200 attaques ayant fait 13 000 victimes sur le continent entre janvier et septembre 2024 », rappelle la revue El Djeïch dans son dernier numéro du mois d’octobre.
Consacrant un long dossier à la crise sécuritaire dans cette vaste région d’Afrique et ses répercussions, non seulement sur les pays du voisinage mais également sur tout le Continent, El Djeïch souligne que cette escalade alarmante, confirmée par les statistiques internationales, « a suscité l’inquiétude des acteurs régionaux et internationaux ».
Les positions officielles ont souligné que le Sahel est devenu l’épicentre du terrorisme mondial. C’est ce qu’a rappelé Ahmed Attaf, ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, lors d’une réunion de haut niveau du Conseil de sécurité de l’ONU sur la lutte contre le terrorisme en Afrique. Il a affirmé que l’épicentre du terrorisme mondial s’est déplacé vers le Sahel subsaharien, qui représente aujourd’hui à lui seul plus de 48% des décès liés au terrorisme dans le monde, contre 1% en 2007.
Corridors du crime organisé
Les menaces sécuritaires qui pèsent sur le Sahel ne se limitent pas au terrorisme. Elles englobent également, toujours selon El Djeïch, la prolifération des réseaux du crime organisé, facteur aggravant de l’instabilité, en particulier après que leurs activités se sont diversifiées pour inclure le trafic de drogue et d’armes, la traite des êtres humains, l’immigration clandestine, le blanchiment d’argent et autres opérations illicites.
Selon certains rapports internationaux, la région est devenue un couloir majeur pour les cargaisons de stupéfiants. Dans son rapport de 2024, l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc), révèle que les saisies de cocaïne ont atteint une moyenne de 1466 kg en 2022.
Le même document indique que le cannabis commercialisé dans la région provient principalement du Maroc, dont la production a atteint environ 901 tonnes en 2022.
Acheminé par voie terrestre via le Sahel, ce cannabis alimente les marchés internationaux. L’ONU classe ainsi le Sahel parmi les plus importants «corridors mondiaux du crime organisé».
« Cette prolifération qui reflète la dangerosité de la propagation et la diversité des activités des réseaux du crime organisé est d’autant plus préoccupante qu’elle contribue directement au financement du terrorisme. L’Indice mondial du terrorisme 2025 a souligné que le trafic de drogue constitue l’une des principales sources de revenus illicites de la région, faisant du Sahel un carrefour stratégique pour les réseaux de contrebande transfrontaliers », relève-t-on encore.
Pourquoi le Sahel est-il devenu un terrain fertile pour le terrorisme et le crime organisé ?
Au vu de ce qui précède, selon de nombreux experts et rapports onusiens, le Sahel restera, à court terme, l’épicentre du terrorisme et du crime organisé. Plusieurs facteurs expliquent cette situation : fragilité de certains Etats, incapacité à contrôler leurs vastes territoires, faiblesse des institutions et des moyens sécuritaires, instabilité politique chronique… La situation est encore plus critique du fait que les organisations terroristes et les réseaux du crime organisé bénéficient de vastes zones échappant à tout contrôle et d’un environnement socio-économique fragile, caractérisé par une pauvreté généralisée, le chômage massif, le manque de développement, les crises humanitaires récurrentes (famine, déplacements internes, conflits tribaux armés).
Le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires estimait en 2024 que 32,8 millions de personnes dans la région sont affectées par un enchevêtrement de crises aggravées par l’instabilité, la détérioration sécuritaire et les effets du changement climatique. Ces conditions des populations désespérées et en souffrance créent un terreau favorable à l’endoctrinement et au recrutement terroriste.
Tous ces facteurs interdépendants ont fait du Sahel à la fois une base arrière pour la réorganisation des groupes terroristes et un sanctuaire pour l’essor des activités criminelles transfrontalières, ce qui complexifie davantage le paysage sécuritaire et étend ses répercussions bien au-delà des frontières nationales, pour affecter directement la paix et la stabilité régionales, voire la sécurité internationale. Situation qui a fait que la région est devenue un théâtre ouvert à l’intersection d’agendas régionaux et internationaux et de conflits d’influence.
In El Djeïch