La cour d’appel d’Alger a confirmé, hier, la condamnation à cinq ans de prison ferme de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Il est poursuivi pour plusieurs chefs d’accusation : « atteinte à l’unité nationale », « outrage à corps constitué », « pratiques nuisibles à l’économie nationale », ainsi que « détention de contenus menaçant la sécurité de l’État ».« Le verdict du tribunal de première instance a été confirmé.
Vous avez huit jours pour introduire un pourvoi en cassation », a déclaré en français la présidente à l’attention de Boualem Sansal, présent et debout dans la salle, selon un journaliste de l’AFP ayant assisté au procès. Pour rappel, le parquet avait requis, en première instance, 10 ans de prison. Depuis son arrestation en novembre 2024, l’affaire dite «Sansal» cristallise une crise diplomatique sans précédent entre Alger et Paris. Expulsions croisées de diplomates, gel de la coopération bilatérale et tensions autour des visas diplomatiques rythment les relations entre les deux pays. Le Premier ministre français François Bayrou a appelé, hier après la condamnation de l’écrivain, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, à envisager des mesures de grâce, invoquant l’âge et l’état de santé de l’écrivain, atteint d’un cancer de la prostate. Les multiples demandes de libération ou d’une grâce du président algérien, Abdelmadjid Tebboune, «un geste d’humanité» réclamé par le président français, Emmanuel Macron, en personne, sont restées lettre morte. Et pour cause. En Algérie, la Justice est indépendante. Une réalité que la France tente de voiler. N’est-ce pas cette même France qui soutenait que «l’autorité judiciaire, qui agit en toute indépendance, est seule compétente pour se prononcer», au lendemain de la vive protestation d’Alger contre la détention en France d’un agent d’un consulat algérien, accusé d’implication dans le pseudo-enlèvement, fin avril 2024, sur le sol français d’Amir Boukhors dit «Amir DZ», qui fait l’objet de plusieurs condamnations par contumace dans des affaires liées à diverses accusations.
Ni compassion ni repentance
Réagissant au verdict confirmé, le porte-parole du ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères a affirmé, dans un communiqué mis en ligne par le service de presse du Quai d’Orsay, que «la France regrette la condamnation en appel à une peine de prison ferme de notre compatriote Boualem Sansal qui maintient la peine prononcée en première instance». Le même responsable a soutenu que «cette décision est à la fois incompréhensible et injustifiée». Néanmoins, la France ne s’interroge pas si son ingérence flagrante dans les affaires de l’Algérie était justifiée ? Par cette «injonction», on peut dire que Paris est nostalgique du temps du protectorat et estime que la justice algérienne obéit aux ordres de l’Élysée ! Un temps révolu depuis belle lurette.
Et de réitérer l’appel aux autorités algériennes pour décréter un geste humanitaire en faveur de l’écrivain. «La France appelle les autorités algériennes à faire preuve d’un geste de clémence et à trouver une issue rapide, humanitaire et digne à la situation de notre compatriote, prenant en compte son état de santé et des considérations humanitaires. Notre souhait est qu’il puisse être libéré et soigné», lit-on dans la déclaration.
Des appels qui risquent de rester lettre morte. D’autant que ces discours sur la «compassion» et la «voie humanitaire», il serait bon que la France s’en souvienne dans ses centres de rétention et face aux interdictions de visa imposées aux Algériens malades et dans le besoin !
Aussi, verser des «larmes de crocodile» pour un «imposteur» serait «hypocrite». C’est une manière de vouloir émouvoir son entourage, se plaindre d’un mal pour tromper autrui et obtenir quelque chose en retour. Le théologien Asterios le Sophiste n’encourageait-il pas le chrétien en carême à se conduire comme un crocodile repentant, à imiter «les crocodiles du Nil qui, paraît-il, se lamentent sur la tête des hommes qu’ils ont dévorés et pleurent sur leur crime» ?
Badis B.
