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L’U.E classe l’Algérie pays à «haut risque» : Un signal politique sous couvert de lutte anti-blanchiment ?

    Cette décision entraînera un renforcement des contrôles sur les transactions financières entre l’Algérie et les États membres de l’UE.

 

 

La Commission européenne, organe exécutif de l’Union européenne, a inscrit mardi l’Algérie, aux côtés de Monaco, du Liban, et d’autres pays tiers, dans sa liste actualisée des juridictions présentant des lacunes stratégiques dans leurs dispositifs de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Selon le communiqué officiel, cette inscription signifie que les entités de l’Union européenne soumises aux règles en matière de lutte contre le blanchiment devront désormais appliquer une vigilance renforcée lors de transactions impliquant ces pays, afin de préserver l’intégrité du système financier européen. La Commission précise que cette révision s’appuie sur une analyse technique rigoureuse, basée sur des critères précis et une méthodologie structurée. Elle intègre notamment les données fournies par le Groupe d’action financière (GAFI), qui évalue les efforts des États dans ce domaine, ainsi que les résultats de dialogues bilatéraux et de visites de terrain.

 

Un argument fallacieux

L’Algérie, qui maintient une coopération proactive avec le GAFI, a adopté plusieurs mesures dans le cadre de ses efforts pour le renforcement de son cadre de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Preuve en est qu’à l’issue de sa réunion plénière tenue le 25 octobre en cours à Paris, le GAFI ne recommande nullement de mesures de vigilance renforcées contre l’Algérie, mais encourage une approche de gestion basée sur les risques, en lieu et place d’une stratégie d’écartement des risques (de-risking). De plus, le GAFI reconnaît et salue les efforts consentis par l’Algérie depuis l’adoption de son Rapport d’évaluation mutuelle (REM) en mai 2023, pour la prise en charge effective des actions recommandées, qui ont été réduites de manière fort importante, notamment à travers l’amélioration de la conduite des enquêtes et poursuites relatives au blanchiment de capitaux.

 

Stratégie nationale de prévention et de lutte

C’est là une progression parfaitement illustrée par la réduction du nombre des actions recommandées de 74 actions à 13 actions seulement à octobre 2024. Ce qui témoigne de la ferme volonté de l’Algérie à aligner le régime national de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, avec les meilleures pratiques.

La volonté de se conformer aux standards internationaux en matière de lutte contre le blanchiment d’argent est de plus en plus affichée pour sortir le pays de la liste grise dans laquelle le GAFI l’a placé en octobre dernier. Des engagements sont pris dans ce cadre comme le montrent les réunions régulières qui se tiennent concernant ce dossier. La dernière en date et la première pour l’année en cours a eu lieu ce 28 janvier. En outre, l’Algérie dispose d’une Stratégie nationale de prévention et de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (2024-2026), élaborée avec la participation de l’ensemble des secteurs et entités concernés. Cette stratégie vise à renforcer le cadre législatif, réglementaire et institutionnel, à renforcer les ressources humaines et techniques, à accompagner les professionnels assujettis, à prévenir des risques par une meilleure connaissance des acteurs, à optimiser la supervision et à poursuivre la coordination nationale et la coopération internationale ainsi que l’amélioration du cadre de la lutte contre le financement du terrorisme.

 

Un chantage politique

Derrière l’ajout de l’Algérie à la liste des pays à haut risque de l’Union européenne en matière de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme se cache une sanction déguisée, d’autant qu’elle intervient à un moment charnière pour les relations euro-méditerranéennes.

En effet, la décision de la Commission européenne risque d’avoir un effet dissuasif sur les acteurs bancaires et financiers européens. Ainsi, toute opération avec l’Algérie sera considérée comme sensible, soumise à des obligations de vigilance renforcée. Conséquence : gel potentiel de certains investissements ou transferts de fonds. Sur ce point, notons l’absence de réaction des partenaires privilégiés de l’Algérie, à l’instar de l’Italie, de l’Allemagne et de la Slovénie.

De la complicité européenne

Cette mesure pourrait être perçue comme une pression exercée par Bruxelles sur un partenaire régional «douteux», qui ne partage pas les orientations politiques ou économiques de l’UE. En effet, cette classification signifie que les banques et institutions financières européennes devront appliquer des vérifications renforcées sur les transferts d’argent en provenance ou à destination de l’Algérie. Les entreprises et particuliers effectuant des opérations transfrontalières pourraient également être soumis à des contrôles plus stricts. Or, en réalité, il appartient à l’Algérie de qualifier certains pays européens de «douteux» en raison de leur «silence» et de leur «complicité». En effet, l’Algérie ne cesse de déplorer l’«absence de coopération» de certains gouvernements européens, notamment, français, dans sa quête de récupérer les biens transférés illégalement à l’étranger. C’est l’Algérie qui a saisi la justice française de cinquante-et-une commission rogatoire, sans obtenir une seule réponse. C’est elle qui a sollicité l’extradition d’individus convaincus de vols, de dilapidations et de détournements de fonds publics, ainsi que de corruption, sans obtenir satisfaction. Par de tels manquements, les autorités françaises concernées se désignent elles-mêmes comme complices de toutes ces pratiques et comportements hors-la-loi. Car le terrain de blanchiment d’argent est ailleurs.

Badis B.

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