Pour acheter de la viande rouge à 1 200 DA, il faut se lever tôt, se préparer mentalement à faire cet achat et surtout aller demander la «bénédiction» de sa grand-mère dont les paroles pourraient bien vous guider vers la boucherie qui en vend. Malgré toutes ces étapes, il y a 99% de chance que votre souhait reste au stade de l’intention. Car, de cette viande importée, nombreux sont les algérois qui n’ont ni vu sa couleur, encore moins senti ses odeurs. Et pourtant les autorités affirment chaque jour que Dieu fait que la viande est disponible et que les points de vente sont nombreux. D’ailleurs, des vidéos ont été partagées sur les sites officiels, à la télévision aussi, montrant cette viande exposée à la vente. Mais où ? Certains disent que c’était à Chlef, Oran ou Aïn Defla… A Alger, les fouineurs d’«élite» ont réussi à dénicher trois endroits où cette viande est vendue. Le premier à Reghaïa, le second à El Biar et le troisième à Souakria, Meftah. Mais pour pouvoir en acheter, il faut être un lève-tôt et se présenter pour faire la queue…Il faut aussi être libre de suite parce qu’on ne sait pas si la livraison de cette viande est quotidienne, il faudra donc se présenter plusieurs jours avant de pouvoir s’approvisionner. Pourquoi se donner tant de peine et risquer même de perdre son emploi ? La raison est évidente. A 1 200 Da, le père de famille algérienne pourra se permettre au moins une ou deux fois de s’offrir de la viande pour ce mois de Ramadhan. Sinon, pour la viande locale, il faut repasser. Hier matin, au marché de Belcourt, la viande bovine locale avoisinait les 2 000 DA alors que l’ovine était à 2 750 Da ! C’est la raison qui amène les familles à chercher sans relâche où se vend cette vende importée. Mais vainement ! Au premier mai, dans le souk de proximité installé, comme chaque année, à l’entrée de la Centrale syndicale, beaucoup de produits sont exposés mais pas de viande importée. C’est le cas également du souk, érigé à la Safex. Dans la rue, c’est devenu même un sujet de plaisanterie. Lorsque vous demandez où se vend cette viande à 1200 DA, vous avez droit à ce genre de réponse «rentrez chez-vous, attendez le 20h et dès que le journal télévisé commence, faites vos achats… ». Pourtant, officiellement, le ministère de l’Agriculture et du Développement Rural a publié un communiqué, sur sa page Facebook, à propos de la supervision de l’importation de veaux via l’algérienne des viandes, Alviar. Selon ledit communiqué «un deuxième navire, contenant 2 500 têtes de veaux provenant d’Amérique du Sud (République brésilienne), est arrivé le 31 mars 2023. La viande sera commercialisée à un prix fixe de 1 200 DZD par kilogramme pour offrir un prix abordable aux consommateurs.» Le département de Abdelhafid Henni parle d’un second navire et la viande n’est toujours pas disponible !! Le communiqué soutient que la viande rouge fraîche sera disponible dans les grandes surfaces et points de vente d’ALVIAR. Et pourtant, chez Alviar, point de viande. A Dar El Beida, à titre d’exemple, il y a du poulet, des œufs mais pas encore de la viande rouge. Mais même pour acquérir de la viande blanche, dont les prix ont dépassé tout entendement ces derniers mois, il faut se lever tôt, faire une longue, très longue queue et attendre des heures pour voir arriver le camion de livraison. Le prix du poulet est fixé à 350 DA le kilo alors qu’ailleurs il avoisine les 500 DA. L’escalope de poulet affiche, en dehors d’Alviar, les 1050 Da le kilo ! C’est pourquoi les pères de familles se retrouvent obligé à attendre deux ou trois heures devant des portes fermées d’Alviar juste pour pouvoir faire des achats à moindre prix. Mais voir ces longues files pour l’achat d’un poulet ou d’un plateau d’œufs est désolant. Ces images renvoient à des dizaines de décennies en arrière. Avec de tels agissements, ce n’est pas le prix de la viande qui sera abaissé mais bien évidemment le moral des algériens tout autant que l’économie du pays puisque, pour faire ses courses, un fonctionnaire doit passer ses journées à attendre l’heure de livraison de la viande ou du poulet au prix abordable.
Amine Ghouta