Chronique

Douze métiers, treize misères

Par Rachid Ezziane

«Dans toutes les professions, chacun affecte une mine et un extérieur pour paraître ce qu’il veut qu’on le croie.» La Rochefoucauld

Il n’y a pas plus malheureux qu’un « changeur » de métiers, dit l’adage populaire. Toute sa vie ne sera qu’un «requiem» de douleur. Et de nouveaux départs. L’insatisfaction se répétera à profusion. Se multipliera à l’infini. Et la misère avec. Et ça passe. Les métiers et les emplois. Du plus prestigieux au plus vil. Du plus rémunéré au moins disant. Et au suivant !…

Douze métiers, treize misères, n’est-ce pas ? Ou comme dirait l’autre, trente-six métiers, trente-six misères. Mais la douzaine ça suffit à rendre son homme malheureux comme un coq mouillé. Ou comme une grenouille qui veut grossir comme un bœuf. Ou comme le corbeau qui voulut apprendre la marche de la colombe et à la fin il ne sut ni marcher comme elle ni ne put reprendre sa façon de marcher. Mais comme les vents ne soufflent pas comme le désire le timonier, alors autant en emporte la bourrasque des humeurs et des coups de tête. Car notre ami «changeur» de métiers ne fait qu’à sa tête. Il vadrouille là où le pousse l’ego et le dégoût. Les aléas et la disette.

Voyons voir maintenant du côté de celui qui ne change jamais de métier. Est-il vraiment heureux dans son travail de « Sisyphe » ? Il supporte tout par peur du changement. Il ne peut pas concevoir un lendemain sans son passé. Aussi contraignant soit-il. Aussi inapproprié à sa nature d’homme libre.  Et les jours passent. Et le monsieur s’habituera à son métier sans l’aimer. Et il continuera à l’exercer juste pour sa survie. Comme un automate.

Mais voilà, il n’y a pas comme celui qui aime ce qu’il fait. Celui-là se transcendera pour rester toujours sur le qui-vive et n’aura jamais de temps pour se poser des questions, car chaque heure qu’il passe dans son travail lui procure de la joie et, surtout, de la force pour créer et améliorer son métier. « Il faut aimer pour créer », disait Goethe.

Mais, tout compte fait, comme dit le grand poète Pablo Neruda,  «il meurt lentement», et même profondément, celui qui ne regarde pas la vie comme une bénédiction divine et prend de chacun de ses atours une cuillerée de bonheur  chaque matin. Et ne va pas loin celui qui ne prend de la vie que son apparence. Que nous ayons plusieurs métiers ou un seul, là n’est pas la vraie question, mais ce que nous avons fait de notre vie qui nous rend heureux ou malheureux.  Douze métiers ou treize emplois, que peuvent-ils m’apporter si je ne ressens rien envers mon prochain.  Ou si aucune humanité n’imprègne mes actes. Le reste, mes amis, n’est que ruine de l’âme et délectation à l’eau de rose. A bon entendeur, salut !  Et à demain pour une autre chronique au fil du jour…

 

Nadir K

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