La Fondation Bill et Melinda Gates a dépensé près de 6 milliards de dollars au cours des 17 dernières années pour essayer d’améliorer l’agriculture, principalement en Afrique. C’est beaucoup d’argent pour un secteur sous-financé et, de ce fait, ces fonds exercent une forte influence. Pour mieux comprendre comment la Fondation Gates oriente l’agenda agricole mondial, l’Organisation à but non lucratif “GRAIN” a analysé toutes les subventions versées par la fondation en faveur de l’alimentation et de l’agriculture, jusqu’en 2020.Ainsi, elle a constaté que, bien que les subventions de la Fondation ciblent tout particulièrement les agriculteurs africains, la grande majorité de ses financements vont à des groupes en Amérique du Nord et en Europe. Les subventions ont également tendance à privilégier fortement les technologies développées par les centres de recherche et les grandes entreprises des pays du Nord à l’intention des agriculteurs pauvres des pays du Sud, sans tenir aucun compte des connaissances, des technologies et de la biodiversité dont ces agriculteurs disposent déjà. Et, malgré l’accent mis par la Fondation sur les solutions technologiques, une grande partie de ses subventions sont accordées à des groupes qui font pression en faveur de l’agriculture industrielle et sapent les alternatives. Le résultat est néfaste pour les agriculteurs africains comme pour la planète. Il est temps de mettre fin à l’influence démesurée de la Fondation Gates sur l’agriculture mondiale. La Fondation Gates n’accorde aucun financement aux systèmes de semences paysannes, qui fournissent 80 à 90 % des semences en Afrique. Mais elle finance généreusement ceux qui les détruisent. Du reste, la Fondation finance le lobby de l’agrobusiness pour que les politiques agricoles en Afrique aillent vers une agriculture commerciale, industrialisée et high-tech. Les subventions de la Fondation Gates pour l’alimentation et l’agriculture en Afrique financent la recherche dans le Nord, et non les agriculteurs du Sud : à peine 5 % des subventions vont directement à des organisations africaines.
Rabah Karali