L’ancien brillant milieu de terrain du RC Kouba et du MC Alger, Smaïl Ferroudj, est installé aux USA en 2004 juste après avoir arrêté précocement sa carrière en Algérie.
Que devient Smaïl Ferroudj ?
Je vis aux USA, plus exactement au New Jersey. J’ai obtenu la Licence Nationale B de la Fédération américaine de football (USSF B License). J’allais postuler pour la Licence Nationale A seniors, malheureusement la Covid-19 a tout remis en cause. J’ai déjà lancé une académie (Soccer/Futbol Academy). Je fais aussi de la traduction en Français, en Arabe et en Tamazight. Pour le moment, j’ai signé deux contrats avec deux clubs de football : Hackensack Royals et Dragons soccer club où j’entraine des jeunes garçons et filles de 10 et 23 ans. Je vais prendre part en janvier prochain à une conférence qu’organisera une association d’entraîneurs de football (United Soccer Coaches Digital Convention). L’illustre technicien portugais de Tottenham, José Mourinho, sera de la partie. Mourinho a confirmé officiellement sa participation à cette conférence.
Pourquoi avez-vous choisi le chemin de l’émigration ?
Après les problèmes vécus au RC Kouba et au MC Alger, j’ai envoyé des courriers à la FAF, à la FIFA et au TAS. Je n’ai eu aucune réponse. Lors de la saison 2002 /2003, je m’entrainais avec l’USM El-Harrach dont je salue au passage et les dirigeants et les amoureux d’Essefra, tout en tentant ma chance à la Green Card, la carte de résident permanent aux Etats-Unis. La chance m’a souri. Je me suis installé aux USA en 2004, après un bref passage par Paris où j’ai décroché une licence en justice criminelle internationale. J’allais devenir avocat, mais j’ai tout abandonné après le décès de ma mère. J’ai décidé de revenir au foot et de faire une formation d’entraîneur aux USA.
Avez-vous trouvé des difficultés pour vous adapter, vous introduire dans le football américain ?
Le football américain suit le système de la NBA. Le modèle, c’est pay to play (payer pour jouer). C’est un milieu difficile, car il y a trop de piston. Il y a beaucoup d’entraîneurs anglais qui privilégient un peu leurs amis. Les académies préfèrent recruter des bénévoles et des entraîneurs sans diplômes pour ne pas les payer ou leur donner des miettes. Ils préfèrent garder l’argent pour eux.
Quel regard portent les Américains sur le football algérien ?
La majorité des Américains que j’ai rencontrés, connus et côtoyés, croit que je suis Nigérian ! Il y a des Américains qui connaissent et qui adorent Mahrez, ainsi que Feghouli et les joueurs qui ont évolué dans les championnats anglais. Ils suivent beaucoup le foot anglais.
Comment a été vécu le dernier sacre africain de l’EN aux USA ?
Une fierté et une immense satisfaction pour tous les Algériens. En ce qui me concerne, je regrette que ce sacre n’ait aucune incidence sur le football local qui baigne encore dans le bricolage. Composée essentiellement de joueurs formés en France, la sélection nationale n’est que l’arbre qui cache la forêt. Je ne suis pas contre la venue des binationaux, mais je m’interroge sur le sort de l’EN s’ils avaient continué à porter les couleurs françaises. La solution est de lancer des centres de formation chez nous, et de travailler sur le long terme pour avoir de grands clubs capables d’alimenter nos équipes nationales par des joueurs de qualité. Que cesse le bricolage, la fuite en avant !
Suivez-vous toujours l’actualité de vos anciens clubs : l’O Akbou, le MO Béjaïa, le RC Kouba et le MC Alger ?
Je sais que l’O Akbou est entre de bonnes mains. Son président a mis tous les moyens pour atteindre ses objectifs, soit jouer en Ligue 1 un jour. Je pense que l’O Akbou est mieux structuré et organisé que plusieurs clubs de l’élite. Le MO Béjaïa est instable. Il continue à joue à l’ascenseur. Il est pris en otage. Il y a trop de décideurs dans ce club très populaire. Dommage ! Quant au RCK, il est victime de problèmes financiers et du manque de sponsors. Le MCA est à l’abri avec la Sonatrach, mais il n’arrive toujours pas à atteindre une certaine stabilité et à remporter des titres constamment.
L’un de vos anciens camarades au RCK, Mehdi Khelfouni, a rendu l’âme tout récemment, après une délicate fin de carrière, vous êtes peiné, n’est-ce pas ?
J’ai eu de la chance de jouer avec Mehdi Khelfouni, un coéquipier sérieux et brave. La Covid-19 l’a emporté si jeune et je présente à sa famille mes sincères condoléances. Que Dieu l’accueille en Son Vaste Paradis. Quand j’ai entendu Nacer Zekri dire qu’il était agent de sécurité, ça m’a fait mal au cœur. J’ai toujours demandé aux joueurs de créer un syndicat pour se protéger de la hogra. Je lance un appel aussi aux joueurs pour faire des formations en parallèle, car notre football n’est pas une garantie pour se faire une situation. Il n’y a ni retraite, ni assurance. La carrière du footballeur est très courte, et s’il se blesse, c’est la descente aux enfers.
Etes-vous prêt à revenir au pays en cas d’une proposition pour travailler dans un club algérien ?
S’il s’agit d’un club avec une vision, une philosophie, qui veut travailler pour le développement et la formation des jeunes, je suis partant. Je suis ambitieux et je peux jouer aussi pour les accessions ou les titres. Je suis très reconnaissant envers mon pays où j’ai eu la chance de travailler avec de grands entraîneurs et éducateurs, mais aussi la chance de faire des études dans le sport et la psychologie. J’aimerais bien transmettre mon expérience et mon savoir aux Algériens et Algériennes que je salue chaleureusement.
Entretien réalisé par L. Bouazza