La guerre du tri aura-t-elle lieu ?
L’Agence nationale des déchets, l’AND, vient d’annoncer les résultats d’une étude qui prévoit la création de plus de 7000 postes de travail dans le recyclage des déchets plastiques, entre emplois directs et indirects. En attendant, ces emballages usagés continuent de joncher le territoire national avec de graves conséquences sanitaires. A quand le sursaut ?
Cela fait des années que notre pays souffre de milliers de décharges sauvages où les déchets en plastique dominent, se dégradant très lentement et causant un préjudice dangereux pour notre écosystème.
Le tri en retard
Nombre de citoyens s’interrogent sur la récupération encore très faible de ces déchets qui sont recyclés depuis longtemps par le monde. Mais, jeudi dernier, Karim Ouamane, le directeur général de l’AND, a annoncé les résultats d’une étude qui «prévoit la création de plus de 7200 emplois, dont 2200 emplois directs et plus de 5000 indirects, et 90 unités dans le domaine du recyclage des déchets plastiques.» Le directeur confirmant l’existence d’un créneau porteur qui pourrait à la fois éliminer une partie de ces déchets du décor et créer de l’emploi. Certes, ce type de déchets ne représente qu’une petite portion du volume global des ordures ménagères mais c’est peut-être la plus toxique parce que la moins biodégradable dans la nature. De plus, le recyclage permettra de libérer de la place dans les casiers des centres d’enfouissement techniques, les CET, dont la plupart sont déjà saturés. L’étude envisage, en effet, «l’économie d’une surface de 100.000 m3 au niveau des Centre d’enfouissement technique (CET), où la disponibilité du foncier se pose avec acuité dans plusieurs wilayas» toujours selon le directeur de l’AND.
Approche scientifique
Sur un autre plan, M. Ouamane a plaidé pour une rationalisation de la collecte des ordures selon un plan directeur que ses services spécialisés ont élaboré et qui fera l’objet d’une adaptation pour chaque commune en fonction des spécificités. Insistant sur «la nécessité de passer à l’application d’un plan directeur appuyé par des études précises et un schéma intégré de gestion des déchets couvrant l’ensemble du territoire de la collectivité, pour une prise en charge technique, objective et professionnelle de ce volet», le DG a aussi assuré qu’une campagne de sensibilisation visera les collectivités locales pour changer leur méthode dans le ramassage et le traitement des déchets. Des webinaires, visioconférences, seront animés régulièrement pour orienter les gestionnaires à l’échelle locale et informer, dans un second temps, les citoyens par le biais de la presse. Sans oublier les enfants qui bénéficieront aussi d’une large campagne d’informations éducatives, certainement à la reprise des classes pour promouvoir la protection de l’environnement par le tri des ordures ainsi que l’élimination des décharges sauvages. L’essaimage des déchets sur les trottoirs ou accotements de routes devrait cesser pour peu que ces campagnes de sensibilisation parviennent à réhabiliter progressivement le civisme.
Nombreux préjudices
Il est à espérer que cette approche économique et scientifique du traitement des déchets porte vite ses fruits en raison de graves répercussions qu’a occasionnées la faillite passée. Nos villes et campagnes ont été balafrées par le phénomène des «ordures partout» laissant un sentiment d’impuissance chez les exécutifs locaux, les associations et les volontaires qui organisent des volontariats ponctuels de nettoyage sans jamais réussir à éliminer de façon durable les tas d’immondices qui se régénèrent à chaque fois. Un préjudice qui touche à la santé publique puisque de nombreuses maladies sont réapparues, liées à cette pollution, en plus d’un spectacle affreux qui disqualifie notre pays dans le développement du tourisme pourtant potentiel énorme pour notre économie nationale. Il faut aussi noter que ces déchets polluent aussi la mer et les terres agricoles en menaçant les cultures déjà fortement affectées par les réseaux d’eaux usées qui ont dégradé les oueds et puits d’irrigation. On doit aussi signaler que les circuits d’évacuation des eaux de pluies, lorsqu’ils existent, sont souvent obstrués par ces déchets lors des pluies diluviennes, ce qui participe aux inondations. Les déchets ménagers sont à l’origine de trop de dégâts en Algérie pour que les pouvoirs publics tardent encore à prendre en charge cette problématique.
Nordine Mzala