Une offre supplémentaire sur le marché pourrait influencer les prix du baril, surtout si la demande ne suit pas la même dynamique
Les pays de l’OPEP+ prévoient, lors de leur prochaine réunion le 5 mai prochain, de réajuster leurs décisions concernant la production de pétrole. Un réajustement confirmé hier par le président de la conférence OPEP en 2025, le ministre du Pétrole iranien, Mohsen Paknejad. «En tant que président de la conférence OPEP en 2025, je tente de négocier avec certains de mes confrères d’autres pays de l’Opep+ afin qu’ils ajustent les volumes de production qui arrivent sur le marché», a déclaré à la presse Mohsen Paknejad. Selon l’agence presse Reuters, l’OPEP+ envisage une nouvelle augmentation accélérée de la production pétrolière. Citant trois sources proches des discussions de l’Opep+, Reuters indique que plusieurs membres de l’Opep+ vont suggérer au groupe d’accélérer la hausse de sa production de pétrole en juin pour un deuxième mois consécutif. Dans un contexte où les cours du pétrole restent sensibles à toute variation d’offre, l’évolution des discussions internes de l’Opep+ sera donc très attendue par les analystes comme par les importateurs. La réunion du 5 mai sera également à surveiller pour gauger la capacité de l’organisation à juguler les dissensions entre ses membres et à renforcer la discipline de production future ainsi que le respect des objectifs et quotas fixés.
Marge de manœuvre de l’OPEP+
Censée jouer le rôle de stabilisateur du marché pétrolier, l’OPEP+, confrontée à l’indiscipline de certains de ses membres, semble perdre la main. Malgré de nouveaux plans pour compenser la surproduction, certains membres défient les quotas, à l’image du Kazakhstan qui privilégie sa production nationale. Avec cette attitude, le Kazakhstan s’est révélé particulièrement gênant pour l’OPEP+. Donnant la priorité à l’intérêt national, et non aux quotas de l’OPEP, son ministre de l’Énergie avait récemment déclaré que le gouvernement ne pouvait pas forcer les opérateurs indépendants à réduire leur production et n’avait pas l’intention de réduire la production des champs gérés par l’État, car cela affecterait la production future. L’indiscipline de certains membres de l’organisation, pleinement assumée dans le cas du Kazakhstan, risque d’entraver la stratégie de l’OPEP+ dans son rôle de stabilisateur du marché. Par ailleurs, d’autres nouvelles baissières pour les prix du pétrole se profilent à l’horizon. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré à CBS que Moscou et Washington avançaient dans la bonne direction concernant l’Ukraine, affirmant que «nous sommes prêts à parvenir à un accord, mais il reste encore des points spécifiques – des éléments de cet accord qui doivent être peaufinés». Pendant ce temps, le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araqchi, a déclaré cette semaine qu’il était prêt à se rendre en Europe pour des négociations sur le programme nucléaire iranien avec les puissances européennes, suggérant que Téhéran souhaite réparer les dégâts, ce qui pourrait à un moment donné conduire à la levée des sanctions américaines.
Risques de surproduction
Les prix du pétrole ont atteint leur plus bas niveau en quatre ans en avril, entraînés vers le bas par la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine et par une décision inattendue de l’OPEP+ d’augmenter la production de 411 000 barils par jour de pétrole en mai, soit trois fois plus que ce que le groupe avait initialement prévu. Les analystes des matières premières de Standard Chartered estiment qu’il existe un risque important que les marchés soient bientôt inondés de pétrole, ce qui arrive à un mauvais moment, alors que Wall Street tire la sonnette d’alarme sur le risque croissant de récession. JP Morgan a relevé le risque d’une récession américaine et mondiale cette année à 60 %, contre 40 % auparavant, en grande partie à cause des droits de douane de Trump. De leur côté, les analystes de la banque d’investissement Goldman Sachs, prédisent que le marché pétrolier sera confronté à d’importants excédents jusqu’en 2026. Leurs prévisions évoquent un excédent d’offre de 800 000 barils par jour en 2025 et plus de 1,4 million de barils par jour en 2026. Ces dernières semaines, Goldman Sachs a été l’une des principales banques à abaisser ses prévisions de prix du pétrole dans un contexte d’escalade de la guerre commerciale menée par les États-Unis et de risque d’augmentation de l’offre avec un changement de position de l’OPEP+.
Quel impact pour l’Algérie ?
La baisse des prix du pétrole, si elle se prolonge, pourrait entraîner des répercussions significatives sur les économies dépendantes des exportations d’hydrocarbures, à l’instar de l’Algérie. Une augmentation de la production, dans le cadre de l’OPEP+, constitue une opportunité pour augmenter ses revenus pétroliers mais il s’agit également d’un risque face à un marché devenu très volatile. Cependant, l’Algérie semble disposer de marché de manœuvres. Un prix du baril à la limite des 60 dollars, même s’il grève les revenus, demeure compatible avec un prix de référence retenu dans l’élaboration de la loi de finances pour 2025. Cette loi a été établie sur la base d’un prix de référence du pétrole brut à 60 dollars/baril sur la période 2025-2027, alors que le prix du marché du baril était maintenu à 70 dollars sur la même période. Par ailleurs, l’Algérie a engagé, depuis quelques années, une politique ambitieuse de diversification de notre économie et de diminution de sa dépendance aux hydrocarbures. Même si les objectifs ne sont pas complétement atteints, le processus est sur la bonne voie.
Saïd S.