Dans la crise diplomatique qui secoue les relations bilatérales algéro-françaises, Alger ne compte pas se laisser faire.
Dans un communiqué rendu public lundi, le ministère des Affaires étrangères a officiellement déclaré douze agents de l’Ambassade et des Consulats de France persona non grata, leur imposant de quitter le territoire national sous un délai de quarante-huit heures. Le communiqué précise que cette décision fait suite à l’arrestation, sur la voie publique par les services sous tutelle du ministère de l’Intérieur français, d’un agent consulaire algérien accrédité en France. Qualifiant cette arrestation de «spectaculaire et ostentatoire», le communiqué pointe du doigt la responsabilité du ministre de l’Intérieur français, Bruno Retailleau. «Ce procédé indigne par lequel le ministre de l’Intérieur voulait rabaisser l’Algérie s’est fait sans aucune considération du statut consulaire de cet agent, en faisant fi de tous les usages et pratiques diplomatiques et en flagrante violation des conventions et traités pertinents en la matière». Le communiqué rappelle que les relations entre l’Algérie et la France venaient d’entamer une phase de décrispation à la faveur de l’entretien téléphonique entre les chefs d’Etat des deux pays, lequel a été suivi par la visite en Algérie du ministre français des Affaires étrangères.
Ce début de décrispation s’est vu brutalement contredit par un ministre, qui «excelle dans les barbouzeries à des fins purement personnelles», et «en manque flagrant de discernement politique». «En procédant à une vulgaire arrestation d’un agent consulaire protégé par les immunités et privilèges rattachés à son statut et traité de façon honteuse et indigne tel un voleur, il porte la responsabilité entière de la tournure que prennent les relations entre l’Algérie et la France». Contrairement au président Emmanuel Macron, qui a toujours privilégié la voie diplomatique, Bruno Retailleau est le chef de file des adeptes de la confrontation et du bras de fer.
La fermeté affichée par Bruno Retailleau pourrait être interprétée comme une posture électoraliste, visant à flatter un certain électorat en quête d’autorité, au détriment d’une diplomatie plus mesurée. Une posture qui risque de réduire à néant les efforts en faveur du réchauffement des relations. En expulsant 12 agents français, elle envoie un message clair : toute atteinte à ses intérêts sera sanctionnée, sur la base d’une réciprocité sans concessions. «Tout nouvel acte» de ce type, prévient le communiqué, recevra une «réponse ferme et appropriée». Pour rappel, tout commence avec l’arrestation d’un agent consulaire algérien sur le sol français. Selon les autorités françaises, cette interpellation s’inscrit dans une procédure judiciaire classique, indépendante des considérations politiques. Les procédures judiciaires n’ont rien à voir avec les relations entre deux gouvernements. La justice est indépendante.
Cette affirmation, martelée par les officiels français, n’a pas convaincu les autorités algériennes pour qui le contexte et la forme de l’opération, qualifiée de «spectaculaire», sont inacceptables. En réponse, elles ont choisi d’expulser des fonctionnaires français, affichant ainsi leur détermination à ne laisser passer aucun acte qu’elles considéreraient comme une provocation ou une atteinte à l’intégrité diplomatique du pays.
Saïd S.