Actualité La Une

Télévisions-Ramadan : Séries légères, influenceurs incompétents et publicités envahissantes…

Le trio infernal qui déçoit une société en quête de sens

 

Le mois sacré de Ramadhan, traditionnellement dédié à la spiritualité, à la réflexion et au renforcement des liens familiaux, est devenu en Algérie le théâtre d’un phénomène médiatique désolant.

Par Samir MÉHALLA

Chaque année, les chaînes de télévision et les plateformes numériques rivalisent d’imagination pour proposer des productions censées captiver les téléspectateurs. Pourtant, loin de répondre aux attentes d’une société aspirant à l’émancipation citoyenne et à l’éducation des générations futures, ces programmes sombrent dans la médiocrité, la superficialité et le mercantilisme.

 

Des thèmes «glorifiant» les fléaux sociaux

Les productions télévisées et diffusées pendant le Ramadhan algérien sont souvent le reflet d’un paradigme désastreux. Au lieu d’offrir des récits porteurs de valeurs, de projets de société ou d’espoir, elles mettent en scène des thèmes qui glorifient les pires fléaux sociaux : harga, drogue, corruption, tromperie conjugale et légèreté morale. Ces sujets, déjà combattus au quotidien par les services de sécurité et les acteurs sociaux, sont présentés de manière souvent banalisée, voire séduisante, sous prétexte de «refléter la réalité».

 

Mais quelle réalité ?

Celle d’une minorité marginale, certes existante, mais qui ne représente en aucun cas les aspirations de la majorité des Algériens. Une société qui, au contraire, cherche à éduquer ses enfants, à les protéger des images violentes ou dégradantes, et à construire un avenir meilleur. Que peuvent apprendre les jeunes générations de ces productions qui, au lieu de les élever, les enfoncent dans un marasme moral et intellectuel ?

 

La mort de l’art et du professionnalisme

Un autre phénomène inquiétant est la montée en puissance des influenceurs dans les productions ramadhanesques. Ces personnalités, souvent sans formation artistique ni maîtrise de l’art dramatique, se voient confier des rôles principaux et sensibles dans des séries et des émissions. Le résultat est sans appel : des performances médiocres, des dialogues plats et une absence totale de profondeur.

Les réalisateurs, pressés de produire du contenu à moindre coût, préfèrent s’appuyer sur ces figures populaires des réseaux sociaux plutôt que de faire appel à de véritables artistes, formés et expérimentés. L’objectif ? Attirer un maximum de vues et d’audience, quitte à sacrifier la qualité et l’authenticité. Cette logique du «raccourci» est non seulement insultante pour les professionnels du théâtre et du cinéma, mais elle contribue également à appauvrir le paysage culturel algérien.

 

La pollution publicitaire

Enfin, comment ne pas évoquer la pollution publicitaire qui envahit les diffusions de ces séries et émissions ? Les coupures publicitaires interminables, souvent mal placées et répétitives, transforment l’expérience de visionnage en un calvaire pour les téléspectateurs. Les autorités ont certes tenté de remettre de l’ordre dans ce «ramassage vulgaire d’argent», mais force est de constater que les diffuseurs continuent de privilégier le profit au détriment du confort et du respect du public.

Cette logique du «tout argent» est symptomatique d’un système médiatique qui a perdu de vue sa mission première : informer, éduquer et divertir de manière responsable. Au lieu de cela, les chaînes et les producteurs se livrent à une course effrénée aux revenus publicitaires, sans se soucier de l’impact de leurs programmes sur la société. Un mépris total pour les téléspectateurs.

 

Un appel à la responsabilité

Face à ce constat alarmant, il est urgent que les acteurs du secteur audiovisuel algérien prennent leurs responsabilités. Les autorités, les producteurs, les réalisateurs et les diffuseurs doivent travailler ensemble pour proposer des contenus de qualité, porteurs de sens et en phase avec les aspirations de la société.

Le Ramadhan, mois de spiritualité et de partage, mérite mieux que des séries légères, des influenceurs incompétents et des publicités envahissantes. Il est temps de redonner à la télévision algérienne sa vocation éducative et culturelle, et de faire de ce mois sacré une occasion de renouveau, plutôt que de régression.

En attendant, les téléspectateurs algériens, eux, continueront de chercher ailleurs des contenus qui les élèvent, plutôt que de les rabaisser. Car une société qui aspire à l’émancipation ne peut se contenter de ce que lui propose aujourd’hui son petit écran.

Le Ramadhan algérien, autrefois synonyme de convivialité et de réflexion, de séries religieuses… est aujourd’hui gangréné par des productions médiocres et mercantiles. Il est temps de sonner l’alarme et d’exiger un changement radical, avant que cette tradition ne soit définitivement sacrifiée sur l’autel du profit.  Si ce n’est pas déjà le cas !

S.M.

Samir Mehalla

About Author

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Journal algérien spécialisé en économie, politique et actualités variées.

Crésus @2024. All Rights Reserved.