Après près de 19 mois de guerre au Soudan, le Congrès américain a adopté une résolution qualifiant les violations des Forces de soutien rapide et de leurs milices alliées au Darfour de «génocide».
Cette décision, jugée par les observateurs comme un tournant dans la position américaine, pourrait avoir des conséquences sur le déroulement du conflit et sur l’avenir de Mohamed Hamdan Daglo («Hemedti»), le chef des Forces de soutien rapide.
L’adoption de cette résolution par la Chambre des représentants a été éclipsée par l’utilisation du veto par la Russie, qui a bloqué une résolution britannique au Conseil de sécurité de l’ONU visant à arrêter les combats et à protéger les civils au Soudan. Parallèlement, des développements militaires ont eu lieu dans l’état de Sinnar, au sud-est du pays. Néanmoins, l’adoption de la résolution par le Congrès, condamnant les Forces de soutien rapide pour avoir commis un génocide au Darfour et contre les tribus non arabes, a attiré l’attention. Le projet de résolution avait été proposé en février dernier par le sénateur républicain John James et les démocrates Ben Cardin et Cory Booker. À l’époque, il n’avait pas suscité d’adhésion, forçant les auteurs à donner à l’administration américaine un délai de 120 jours pour se prononcer, avant un nouveau vote. N’ayant pas reçu de réponse, le député James a présenté une nouvelle version de la résolution en juin dernier (projet n° 1328), qui a été finalement votée et approuvée à l’unanimité la semaine dernière. Lors de la session à la Chambre des représentants, James a évoqué le nombre de victimes à l’Ouest du Darfour, ainsi que la crise humanitaire au Soudan et au Darfour en particulier. Il a détaillé le nombre de déplacés, de réfugiés et les personnes menacées par la famine. Il a souligné le rôle potentiel de l’administration républicaine dirigée par le président élu Donald Trump dans la gestion de la guerre et de la tragédie humanitaire au Soudan, ainsi que pour la protection des civils au Darfour. James a précisé que cette résolution serait soumise à la nouvelle administration en tant que « programme important» et servirait à soutenir le peuple soudanais. Les observateurs considèrent l’adoption unanime de cette résolution par la Chambre des représentants comme une avancée majeure, marquant une étape importante pour le système législatif américain. Si cette décision est soutenue par le Sénat, elle pourrait avoir un impact significatif sur le déroulement du conflit et la crise humanitaire au Soudan. Étant d’origine républicaine et adoptée à l’unanimité, la résolution aurait davantage de chances d’être validée sous l’administration Trump, qui prendra ses fonctions en janvier prochain. La résolution sera ensuite envoyée au Sénat pour un vote, puis à la Maison Blanche pour la ratification par le président. Si elle est ratifiée, elle deviendra loi. Dans le cas où le président refuserait de la ratifier, la résolution resterait une simple recommandation politique. Des actions seront alors menées par les autorités exécutives, comme le Département d’État, pour appliquer les mesures suggérées, telles que le soutien aux poursuites internationales, l’imposition de sanctions, la création de corridors humanitaires et l’interdiction de l’exportation d’armes. De son côté, l’activité des droits humains, Suleiman Abdel Salam, estime que la position du Congrès américain à l’égard des pratiques des Forces de soutien rapide aura des répercussions sur Hemedti ainsi que sur les pays et groupes qui lui fournissent des armes ou facilitent le passage de mercenaires étrangers. Cela pourrait ouvrir la voie à des sanctions et affaiblir ces forces en bloquant leur accès à l’armement et au soutien logistique. Selon Abdel Salam, la position des législateurs américains pourrait inciter les parlements européens à adopter des positions similaires et mener à la classification des Forces de soutien rapide comme une « organisation terroriste «. Il est également possible que le dossier soit porté devant le Conseil de sécurité de l’ONU et renvoyé à la Cour pénale internationale, comme cela sest produit en avril 2005.
Le juriste soudanais et secrétaire général adjoint de l’Union des avocats arabes, Tarek Abdel-Fattah, estime que l’influence sur la politique étrangère des États-Unis provient du Département d’État, et non du Congrès.
R.I/agences