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Elle est responsable de crimes contre l’humanité en Afrique : La France saura-t-elle sen excuser ?

 Entre l’Afrique et la France, c’est une longue histoire, non seulement de spoliation des ressources naturelles, d’ingérence mais aussi de crimes coloniaux dont cette ancienne puissance ne s’est toujours pas excusée.

 

Divers épisodes historiques font en effet, l’objet de travaux pour déterminer l’ampleur des responsabilités de l’ancienne puissance coloniale. Sans vocation à être exhaustif, Le Monde revient sur cinq dossiers mémoriels qui continuent de susciter des tensions entre la France et des pays africains quelle a colonisés, et sur lesquels des avancées sont attendues. A commencer par les «lourds et grands dossiers» qui plombent les relations entre l’Algérie et la France dont l’excellence était liée au traitement du dossier de la Mémoire, qui doit être débarrassé des survivances du colonialisme, comme réaffirmé en mai dernier, par le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune. Dans un message à l’occasion de la Journée nationale de la Mémoire (8 mai 1945), le Président Tebboune a soutenu que « l’excellence des relations avec la République française ne saurait exister en dehors de l’histoire et du traitement des dossiers de la Mémoire qui ne sauraient faire l’objet d’aucune renonciation ». Les chantiers de la Mémoire avec la France «restent ouverts», a indiqué le Président de la République faisant état de leur poursuite au sujet du rapatriement des crânes de nos valeureux Chouhada, des disparus, de la récupération des archives et de l’indemnisation des victimes des explosions nucléaires au Sahara algérien. Pour le Président Tebboune, ces dossiers doivent être traités «avec sérieux et pondération» afin que le raffermissement des relations entre l’Algérie et la France soit sur des bases solides. Depuis 2022, une commission d’historiens algériens et français planche certes, sur la mémoire de la colonisation de l’Algérie par la France, mais sans que cela n’avance vraiment du côté français. Les travaux de ladite commission, portent sur l’accès aux archives et la restitution de biens spoliés, notamment durant la conquête du territoire algérien par larmée française au XIXe siècle, comme ceux ayant appartenu à l’émir Abdelkader, héros de la résistance algérienne. Lors de sa dernière réunion, en mai, la partie algérienne a transmis une liste de biens « proposés à la restitution », « sous forme de gestes symboliques » alors que le France continue de nier son entière responsabilités dans dossier des essais nucléaires français dans le Sahara algérien et ses effets sur les populations et l’environnement. L’Algérie réclame à la France en effet, « une reconnaissance » et une « indemnisation ». Mais les deux pays, « ne sont pas parvenus à un accord ». Pour rappel, des documents déclassifiés en 2013 en France ont révélé des retombées radioactives importantes qui s’étendaient de l’Afrique de l’ouest au sud de l’Europe. L’Assemblée nationale (francise) a aussi adopté une résolution demandant l’instauration dune journée de commémoration de ce jour. Lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques à Paris, le 26 juillet, la délégation algérienne a rendu hommage à des manifestants jetés dans la Seine, le 17 octobre 1961, par la police française à Paris.

 

Le massacre de Thiaroye

 

Le 1er décembre 1944, des dizaines (voire des centaines, selon les estimations de plusieurs historiens) de tirailleurs africains sont exécutés par larmée française dans le camp de Thiaroye, au Sénégal. «Tout juste rentrés d’Europe, où ils ont combattu dans les rangs de larmée française avant dêtre faits prisonniers de guerre durant la seconde guerre mondiale, ils manifestaient pour obtenir le versement de leur solde correspondant à la durée de leur détention », rappelle Le Monde. L’attribution de la mention « Mort pour la France » à six de ces tirailleurs, le 18 juin, rompt définitivement avec la thèse qui a longtemps prévalu du côté français, selon laquelle les tirailleurs se seraient mutinés, explique-t-on encore. Toutefois, plusieurs interrogations demeurent quant au nombre de personnes concernées par la mention, inférieur au nombre de victimes identifiées même sil a vocation à être élargi. « Ce nest pas à [la France] de fixer unilatéralement le nombre d’Africains trahis et assassinés après avoir contribué à la sauver, ni le type et la portée de la reconnaissance et des réparations qu’ils méritent », a pour sa part critiqué le premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, le 28 juillet. En 2014, l’ancien président français François Hollande avait reconnu la responsabilité de la France dans le massacre de Thiaroye et cédé à Dakar une copie numérisée des archives françaises sur ce sujet. Mais des zones d’ombre persistent : plusieurs historiens sénégalais ont des difficultés pour accéder à ces archives, tandis que d’autres estiment quelles n’ont pas toutes été restituées. L’enjeu est pourtant central, car ces archives permettraient notamment de localiser les fosses communes et d’identifier d’autres victimes, ce qui ouvrirait la voie à davantage de reconnaissance et à d’éventuelles réparations pour leurs descendants.

 

Au Cameroun, l’assassinat de Ruben Um Nyobè

 

La liste des griefs de la France coloniale en Afrique est encore longue comme ce fut le cas au Cameroun, où la France a longtemps nié sa répression sanglante de la guerre d’indépendance. Pourtant, selon l’historien Jacob Tatsitsa, le journaliste Thomas Deltombe et l’écrivain Manuel Domergue, auteurs de l’enquête Kamerun ! Une guerre cachée à l’origine de la Françafrique (La Découverte, 2019), cité par Le Monde, « larmée française est responsable de la mort de milliers de civils et de celle de figures anticolonialistes ». Comme Ruben Um Nyobè, secrétaire général de l’Union des populations du Cameroun (UPC), parti qui luttait pour l’indépendance et la réunification du pays, alors divisé entre une administration française et l’autre britannique. Il fut assassiné le 13 septembre 1958 par larmée française dans la forêt où il se cachait, à l’ouest de Yaoundé, et son cadavre fut traîné de village en village avant d’être inséré dans un bloc de béton. L’historien Achille Mbembe fut lun des premiers à documenter cette histoire : dans les années 1980, il publie des écrits de Ruben Um Nyobè. En 1991, le Cameroun vote une loi pour la « réhabilitation de grandes figures de l’histoire» du pays, levant le tabou qui entoure le rôle de Ruben Um Nyobè et d’autres figures de la lutte indépendantiste.

 

La répression des indépendantistes à A Madagascar

 

A Madacascar également, les revendications indépendantistes furent matées dans le sang. La répression de l’insurrection du 29 mars 1947 dure plusieurs mois, au cours desquels des dizaines de milliers de Malgaches sont tués ou meurent de faim 89 000, selon une estimation de l’état-major français en 1948, aujourd’hui débattue. Des élus du Mouvement démocratique de la rénovation malgache (MDRM), pourtant pacifique, sont arrêtés en dépit de leur immunité parlementaire et torturés. Le 5 mai 1947, à Moramanga, point de départ de l’insurrection, des militants du MDRM sont enfermés dans des wagons et fusillés. Le silence a longtemps régné sur ces crimes avant que le président Jacques Chirac ne reconnaisse, lors dune visite officielle à Madagascar en 2005, le « caractère inacceptable des répressions engendrées par les dérives du système colonial ». Cette déclaration semble avoir satisfait les autorités malgaches. Aujourd’hui, leurs demandes concernent principalement les restitutions de restes humains et de biens liés à des figures de la résistance à la colonisation sur la Grande Ile. Madagascar demande notamment la restitution de trois crânes sakalaves, du nom dun peuple de l’ouest du pays, parmi lesquels se trouverait celui du roi Toera, décapité lors dune attaque française à la fin du XIXe siècle. En mars, une commission franco-malgache a été mise sur pied pour définir les conditions de cette restitution. Par ailleurs, la couronne qui ornait le trône de Ranavalona III, dernière reine malgache, a été rendue par la France à Madacascar en 2020 grâce à la signature dune convention actant un «prêt».

 

Les biens spoliés lors de la colonisation

 

Selon un décompte du journal Le Monde, quelque 90 000 pièces originaires d’Afrique subsaharienne font aujourd’hui partie des collections de musées publics français. Lorsqu’ils reposent dans des musées nationaux, les biens spoliés lors de la colonisation sont considérés comme inaliénables. Grâce à une loi ad hoc votée en 2020, le sabre et le fourreau dEl Hadj Oumar Tall, fondateur de l’empire Toucouleur, ainsi que le « trésor de Béhanzin », un ensemble de 26 pièces appartenant au onzième roi du Dahomey, ont pu être restitués respectivement au Sénégal, à qui les objets étaient déjà prêtés, et au Bénin. La loi-cadre portant sur la restitution de biens culturels spoliés durant la colonisation, dont l’examen a été reporté à l’automne, pourrait permettre daller plus loin que le fonctionnement au cas par cas qui a permis ces premières restitutions. En attendant son adoption, il n’existe pas d’autre moyen de restituer davantage de biens demandés par plusieurs pays africains, à limage du djidji ayôkwé, un tambour utilisé par le peuple ébrié pour communiquer et dont Emmanuel Macron avait promis le retour en Côte d’Ivoire à l’occasion du sommet Afrique-France de 2021.

 

Source Le Monde/Synthèse Y.O

Rédaction Crésus

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